Parfois un gigantesque désordre, maître de l’esprit souffle
telle « la burle », tourbillonne les spectres inconscients - Prison d’un
labyrinthe inexorable.
« Chaque lecture est un acte de résistance. Une lecture
bien menée sauve de tout, y compris de soi-même » Daniel Pennac.
Ce texte je le dois à Charles Simond par son livre « Un
rêve rendu à Cézanne ». Les phrases ou mots en italique sont issus de ce
rêve. Est-ce un rêve, un désir, une
volonté de croiser des destins en défiant le temps, une rencontre obligatoire d’êtres
semblables, rencontre divine, terrestre ? L’encre, la peinture ont tout
pouvoir.
Au jardin, le prunier sauvage ne laisse plus de trace de son
passage terrestre. Les pommiers agrippés au grillage résistaient à l’abattage.
Ce matin une brume légère camouflait notre vallée. L’air blanchâtre concédait
sa froidure immaculée, délicatement saupoudrée au concert multicolore des
quatre saisons.
La lune automnale
éloignée de l’astre brûlant, d’une parfaite rondeur, translucide, honore un
buste. « les ombres bleues du matin…la genèse des tons ». La sève alliée
à la main dévastatrice avaient sculpté un corps.
La maigre silhouette me captive. Elle dépasse le muret et sa
vieille clôture. Tête légèrement inclinée, coiffée d’une casquette, elle ignore
mon regard, scrutant le lointain. Serait-elle
fâchée ? Ou serait-elle un messager ? Soudain, elle me rappelle l’inventeur du
jardin. Celui qui a fait de lui un
verger, une terre nourricière pour sa progéniture. Terre de fruits goûteux, de
racines fortifiantes. Il s’appelait de
son vrai nom « Etienne » dit « Gustave ». Les « carcasses » tombent en
rade. Le paysage se fige. Les bras m’en tombent. La lune demeure fidèle à son
exceptionnelle mission de l’aurore. « Vous avez mis l’éternité dans
l’instant ».
Je m’arrache à ce moment contemplatif du haut de mon balcon
où je fume la première cigarette de la journée…J’entre. Sur la table du salon,
un livre peint de couleurs chatoyantes. Je l’ouvre. Geste presque oublié. Un
mot puis un autre se succèdent réveillant cet univers qui bouillonne en moi et
que j’avais abandonné sur un fourneau éteint. Il faut dire que les parfums culinaires créés
par Colette « ce soir, festin. Je sais- Evangile selon Gasquet !- que
Cézanne aime la viande rouge et les Vieux Bordeaux » ont aussi activé les
aiguilles de l’horloge harmonieuse.
La lampe à pétrole aurait-elle les charmes
de celle d’Aladin ?
Peut-être Gustave est-il en train de converser avec Ramon et
Cézanne ?
« La faillite du mot est le début de la
communication »
Marie-Noëlle Fargier