En ce jour de novembre, une sarabande jaune claire traverse
les ruelles et les rues sombres. Elle brave les avenues dorées.
Têtes hautes, audacieuses, des femmes, des hommes jeunes et
vieux proclament d’une même voix les mêmes mots d’une partition non répétée,
non orchestrée, seulement spontanée, évidente, inévitable. Leur dignité
ébréchée mais encore présente, ils marchent pacifiquement vers leur dernier
espoir. Une dernière volonté avant la faim.
Celle d’être entendu, d’avoir une réponse de ceux qui ne sont plus le
peuple. Ouvrir les yeux à ceux qui les ignorent. Omission confortable ou
sincère ? Ouvrir les oreilles aux malentendants du pouvoir, toucher la
justice. Ecrire leur vécu, les injustices subies. Les cahiers de doléances
s’ouvrent une nouvelle fois.
REPONSE : SILENCE
De semaine en semaine, le mouvement s’exécute, les battements
de cœur se multiplient. Une œuvre s’accomplit. Celle des mains négligées,
oubliées, humiliées.
Les maîtres d’orchestre s’étonnent et s’agitent de cette
soudaine harmonie, symbiose. Des baguettes martèlent les têtes relevées pour
arrêter ce balancier. La sarabande jaune ne fléchit pas. Le rythme s’accélère. Epidémie
dansante. Les intellectuels tentent de déchiffrer ces notes inconnues, noires,
blanches, toutes confondues. Ils s’y perdent. L’âge de la musique est
indéterminé. Les colporteurs se rangent
en colonne ordonnée sous la manchette. La bohème se cache. La sarabande jaune,
elle, découvre son visage avec le même nom.
REPONSE : ARROGANCE
De mois en mois, les gilets s’enfilent et déambulent,
prolifèrent, vocifèrent, obnubilent et horripilent. Le gilet épouse toutes les
formes maigres et anguleuses. Celles du pauvre à l’avenir cachectique. Le
mouvement s’enfle des plus arrondis, résistants, solidaires ou craintifs du
même sort ? Qu’importe ! La colère monte face au silence, face à
l’arrogance. Elle s’entend, se voit, défie. Les rondouillards, goinfrés de
galette et du pain des osseux sans la moindre pudeur, tressaillent. La
sarabande doit cesser ! Les camelots des mots s’égosillent de fausses
rumeurs. Les « Flageolet » se déchaînent, aveuglent, mutilent,
emprisonnent la sarabande. Elle pleure, gémit, souffre. Amputée de membres,
d’organes, elle continue.
REPONSE : VIOLENCE
Le pauvre, le moins pauvre, le futur pauvre, des colporteurs,
des bohèmes, des humanistes rythment la sarabande. Elle danse encore et encore
jusqu’à…LA REPONSE.
REPONSE aux cahiers de doléances : lettre
publipostage
REPONSE aux cris de souffrance : paroles aux écharpes
tricolores
Les gilets jaunes ne peuvent être les destinataires directs
de l’un ou de l’autre. Leurs boîtes aux lettres débordent d’offres
promotionnelles. Ils n’ont pas la science de la rhétorique. A l’instar des plus
forts, ils n’ont ni l’éloquence ni l’art de convaincre. Ils sont le peuple. Un
peuple qui invente, un peuple doté de nouveaux savoirs : le bon sens, l’égalité et le respect de l’Etre
et de la Terre. La sarabande flotte librement, sans attache, aucune.
…
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